ASASSN-15lh, la supernova la plus connue serait une étoile disloquée par un trou noir (ESO)

ASASSN-15lh
Vue d'artiste d'ASASSN-15lh, une étoile trop proche d'un trou noir. Crédit : ESO, ESA/Hubble, M. Kornmesser

ASASSN-15lh, la supernova la plus connue

ASASSN-15lh était considérée comme une possible supernova, la plus lumineuse jamais observée. Elle a été découverte par l’astronome chinois, Dong Subo le 14 juin 2015. Sa luminosité est 570 milliards de fois supérieur à celle de notre soleil ou encore 20 fois la totalité de la lumière de la Voie Lactée. Une nouvelle étude publiée par une équipe internationale d’astronome suggère qu’il ne ‘agirait pas d’une supernova. Il semblerait qu’il s’agisse de la dislocation d’une étoile passant un peu trop près d’un trou noir en rotation rapide. Les résultats de cette étude seront publiés dans la revue Nature. Pour comprendre cette découverte, nous vous proposons dans son intégralité  le communiqué de presse scientifique publié sur le site de l’ESO en date du 12 décembre 2016.

Des télescopes de l’ESO permettent de réinterpréter une brillante explosion

En 2015, le sondage automatisé du ciel en quête de supernovae (ASAS-SN) a détecté la survenue d’un événement baptisé ASASSN-15lh, qui fut alors assimilé à la plus brillante des supernovae jamais observées, et catalogué parmi les supernovae superlumineuses – ou explosions de vieilles étoiles extrêmement massives. Cet événement était deux fois plus brillant que la précédente détentrice du record, son pic de luminosité s’avérant 20 fois supérieur à la quantité de lumière émise par la Voie Lactée dans son intégralité. Une équipe internationale d’astronomes pilotée par Giorgos Leloudas de l’Institut Weizmann des Sciences en Israël et du Centre de Cosmologie Noire du Danemark, vient d’effectuer de nouvelles observations de cette galaxie distante de quelque 4 milliards d’années lumière de la Terre, au sein de laquelle cette explosion s’est produite. L’équipe a proposé un nouveau scénario explicatif de cet événement extraordinaire. « Nous avons observé la source de lumière au cours des 10 mois succédant à l’événement. Il est apparu que la probabilité qu’il s’agisse d’une supernova extrêmement brillante est très faible. Nos résultats suggèrent que cet événement résulte vraisemblablement de la dislocation d’une étoile de faible masse par un trou noir supermassif en rotation rapide », explique Giorgos Leloudas. Dans ce scénario, l’attraction gravitationnelle d’une intensité extrême qu’exerce un trou noir supermassif situé au centre de la galaxie hôte a provoqué la dislocation de l’étoile de type Soleil qui s’en est trop approchée – un phénomène baptisé perturbation de marée qui, à ce jour, n’a fait l’objet que d’une dizaine d’observations. Au cours de ce processus, l’étoile a été transformée en spaghetti, les collisions entre les débris ainsi que la chaleur libérée lors de l’accrétion ont généré un sursaut de lumière. L’événement a ainsi pris l’aspect d’une explosion en supernova particulièrement intense, bien que l’étoile en question ne soit pas dotée d’une masse suffisante pour exploser en supernova.

 L’équipe a basé ses nouvelles conclusions sur des observations effectuées au moyen de divers télescopes – opérant depuis le sol pour certains, depuis l’espace pour d’autres. Parmi ces instruments figurent le Very Large Telescope (VLT) de l’Observatoire de Paranal de l’ESO, le New Technology Telescope (NTT) installé à l’Observatoire de La Silla de l’ESO, et le Télescope Spatial Hubble du consortium NASA/ESA [1]. Les observations avec le NTT ont été menées dans le cadre du Sondage Spectroscopique Public des Objets Transitoires de l’ESO (PESSTO). « Certains éléments, totalement indépendants des observations, plaident en faveur d’une perturbation de marée plutôt que d’une supernova super lumineuse » ajoute Morgan Fraser de l’Université de Cambridge au Royaume-Uni (aujourd’hui à l’University College de Dublin en Irlande), co-auteur de cette étude. Les données ont notamment révélé la succession de trois phases distinctes au cours des 10 mois d’observations de suivi. En outre, ces données semblent en meilleure adéquation avec la survenue d’une perturbation de marée qu’avec l’explosion d’une supernova super lumineuse. La détection d’un sursaut ultraviolet ainsi que l’augmentation de température rendent un peu moins probable un événement de type supernova. Enfin, la localisation même de l’événement – une galaxie rouge, massive et passive – n’est pas propice à une explosion en supernova super lumineuse, qui généralement se produit au sein de galaxies naines de couleur bleue, caractérisées par un taux de formation stellaire élevé.

Bien que l’équipe considère peu plausible toute origine de type supernova, elle n’écarte pas la possibilité que l’événement résulte d’un phénomène autre que la classique perturbation de marée. Nicholas Stone de l’Université Columbia aux Etats-Unis, membre de l’équipe, précise : « La perturbation de marée que nous suggérons ne vaut que si le trou noir supermassif est en rotation. Nous soutenons que l’événement ASASSN-15lh résulte d’une perturbation de marée générée par un type de trou noir très particulier. » Considérant la masse de la galaxie hôte, le trou noir central supermassif doit peser quelque cent millions de Soleils. En temps normal, un trou noir de cette masse ne peut disloquer une étoile située à l’extérieur de son horizon des événements– frontière en deçà de laquelle rien n’échappe à son attraction gravitationnelle. Toutefois, si ce trou noir est doté d’une vitesse de rotation élevée – il fait alors partie des trous noirs de type Kerr, la situation est différente. Cette limite ne s’applique plus. “L’ensemble des données collectées ne nous permet pas d’affirmer avec certitude que l’événement baptisé ASASSN-15lh consistait en une perturbation de marée » conclut Giorgos Leloudas. « Toutefois, cette explication est de loin la plus plausible ».

Notes
[1] En complément des données issues du Very Large Telescope de l’ESO, du New Technology Telescope de l’ESO et du Télescope Spatial Hubble du consortium NASA/ESA, l’équipe a utilisé les résultats d’observations des télescopes suivants : – Las Cumbres Observatory Global Telescope (LCOGT), – Australia Telescope Compact Array, – ESA’s XMM-Newton, – Wide-Field Spectrograph (WiFeS) , – Magellan Telescope.

Source

Le communiqué de presse du 12/12/2016 de l’ESO est ici, celui du site SpaceTelescope est ici.